La Planète Six

Arvo Part 1

Évolution

Lorsqu’en 1962, l’union des compositeurs soviétiques - un organe créé par Staline afin de s’assurer que la création musicale soit en phase avec le bolchévisme - remet son Premier Prix des jeunes à Arvo Part, elle voit certainement en lui le futur représentant musical de l’empire soviétique. Celui qui prouvera que le néo classicisme socialiste est supérieur à tout ce fatras bourgeois et décadent que symbolisent les nouveaux courants musicaux venus d’occident tel que le dodécaphonisme.

Las, quelques années plus tard, elle ne pourra que constater le tournant serialiste pris par le compositeur estonien avec ses deux premières symphonies et ses "collages" de Bach. Elle s’empressera alors de le ranger dans la catégorie des "déviants"et censurera son travail. Très affecté par ces mesures, Arvo Part se détourne temporairement de la composition et se tourne vers l’étude des chants grégoriens. Quand il reprend la plume, une page de son histoire se tourne. Il s’agit désormais pour lui d’incorporer à sa musique de plus en plus d’éléments mystiques. Une musique nourrit par ses angoisses et ses tourments intérieurs face à la création, bien loin de la glorification de l’ouvrier-dictacteur. Les années 60 seront ainsi pour lui une période de recherche où il tentera tant bien que mal d’acquérir son indépendance créative dans un monde totalitaire obsédé par le contrôle de la culture sous toutes ses formes.

El Roze nous propose ici de redécouvrir le travail d’Arvo Part à travers des compositions reflétant cette recherche : ses 2 premières symphonies, son collage sur Bach, son concerto Pro et Contra dédié à Rostropovitch. Autant de travaux où l’on sent encore l’influence de Chostakovitch, Prokofiev, et Bartók.
Sa troisième symphonie sera celle de la transition, la dernière avant de développer un style purement personnel qui finira par séduire le monde entier.